Chaque année, la SARA investit des millions d’euros dans la modernisation de son matériel et de ses outils de production, la consolidation de sa sécurité, la protection et l’amélioration de son environnement. Depuis plusieurs années, la SARA, concernée aussi par sa pérennité le développement durable, mise sur d’autres ressources que les énergies fossiles en s’orientant vers de nouvelles sources énergétiques. C’est ainsi que la dynamique Energies Nouvelles, impulsée voici quelques temps, se matérialise par plusieurs projets sur les trois territoires desservis par la Sara.
Batimag97 a rencontré Nathalie Chillan, Responsable communication, et Henri Roche du département Energies Nouvelles de la Sara, afin de faire un point.
Batimag97 :
Les projets envisagés dans la dynamique Energies Nouvelles sont-ils conditionnés à des critères bien précis ?
Henri Roche :
Oui, les points essentiels qui caractérisent ces projets, au-delà de l’obligation de s’avérer rentables, sont conditionnés à un partenariat (impliquant une coresponsabilité), au soutien – c’est-à-dire à l’acceptation sociale et sociétale – des collectivités locales et enfin, ils doivent contribuer au développement d’emplois locaux.
En quoi consiste le projet Greenwater développé en Martinique ?
– Ce projet, qui répond évidemment à une problématique économique de coût d’utilisation dans un processus de production, permet surtout de prélever moins d’eau potable sur le réseau public, laissant ainsi plus de ressource à la population. Une action vertueuse qui s’inscrit dans le développement durable et la protection environnementale. Greenwater ouvrira aussi la possibilité de maintenir l’activité de la SARA en cas de coupure d’eau.
Quelle quantité d’eau consomme la raffinerie ?
– Chaque heure, la raffinerie prélève du réseau d’eau 20 m3 (soit 20 tonnes). Et ce, 7 jours/7 durant toute l’année. Ce qui nous place en tête de la consommation d’eau en Martinique. Il s’agit donc pour la Sara de substituer l’eau du réseau domestique par une eau brute industrielle traitée sur place pour une utilisation sur place. L’usine a opté pour un prélèvement d’eau de mer qui subira une batterie de traitements qui en feront une « eau brute industrielle ». Ainsi, par le principe de l’osmose inverse, l’eau sera d’abord dessalée et ensuite déminéralisée (débarrassée des autres sels minéraux) afin de pouvoir alimenter les chaudières de l’usine. La quantité d’eau prélevée dans la mer permettra d’obtenir – après traitement – 20 m3/h d’eau industrielle plus 5 m3/h d’eau de service (utilisée, entre autres, pour le lavage de pétrole brut, le nettoyage des réservoirs) de quoi couvrir la totalité de nos besoins.
En sortie de l’osmoseur, les aux concentrées en sel seront mélangées aux eaux épurées par la station de traitement de SARA conduisant à une eau de salinité proche de l’eau de mer avant rejet.
Où se trouve le site de pompage ?
– Le pompage de l’eau de mer va se produire au-delà du point de rejet, très précisément sur un site où la SARA avait installé un dispositif servant de réserve d’eau en cas d’incendie et doté d’un système de pompage puissant (700 m3/h). Fort heureusement, le dispositif n’a jamais dû être utilisé pour éteindre un feu, et aujourd’hui, il va servir d’unité de pompage pour alimenter l’osmoseur en place.
A quelle réglementation la SARA est-elle soumise ?
– L’usine est une ICPE (installation classée pour la protection de l’environnement) et en cela, doit se conformer au Code de l’environnement. Elle est assujettie à la directive « Seveso seuil haut » (classe AS) dont et un arrêté préfectoral d’autorisation d’exploitation prévoit des procédures, des mesures de sécurité, des contraintes ainsi que des prescriptions en ce qui concerne le pompage et le rejet dans l’eau de mer : quantité d’eau prélevée et rejetée, charge des eaux, normes des effluents par rapport au milieu, traitements spécifiques…
La SARA fait un geste fort au niveau de l’environnement, aura-t-il une incidence économique ?
– La question est complexe car le calcul l’est tout autant… Cependant, il faut admettre que la Sara n’enregistrera pas d’économies avant longtemps. En fait, le dispositif global s’avère extrêmement onéreux : miser sur un procédé de prélèvement d’eau de mer suppose un équipement et du matériel pointus capables d’alimenter en continu des unités de dessalement et de déminéralisation. Un tel dispositif ne peut pas tolérer de rupture d’approvisionnement et doit accomplir ses fonctions de manière optimale et permanente 24h/24. D’où la nécessité d’y subordonner un circuit complémentaire qui se substituera au circuit principal en cas d’anomalie, de maintenance, de réparation. Un tel déploiement a un coût… La facture globale de cette nouvelle unité est évaluée à dix fois la consommation annuelle d’eau de la SARA. Sachant que notre consommation approche le million d’euros, faites le calcul, les économies ne sont pas encore à l’ordre du jour.
Le projet Greenwater comporte-t-il d’autres étapes qui s’inscrivent dans le développement durable ?
– Oui, si le prélèvement de l’eau de mer constitue la première phase de notre plan, la SARA a déjà élaboré des étapes ultérieures. La première consiste dans la mise en place d’un filtre planté végétal qui sera arrosé par l’eau en sortie de notre station de traitement des eaux résiduaires (TER).
Actuellement, des prélèvements d’échantillons et des analyses systématiques vérifient si les eaux rejetées répondent aux normes réglementaires. Mais à l’aide de ce filtre planté -sorte de tapis de végétaux- une filtration supplémentaire va pouvoir générer une eau épurée prête à être réinjectée dans l’osmoseur. On évoque carrément l’économie circulaire.
Mieux, l’eau traitée et filtrée par des végétaux aura une autre incidence. Nettement moins chargée en sel, elle allègera le travail de l’osmoseur et modérera son usure. Enfin, notre objectif sera réellement atteint lorsque nous enclencherons la troisième phase du projet qui consiste à récupérer les eaux pluviales. Cette technique est actuellement à l’étude…
Quand ces projets seront-ils opérationnels ?
– Le prélèvement de l’eau de mer est prévu dans le courant du premier trimestre 2019. Le phasage de la deuxième étape est amorcé, le pilote du filtre planté est installé et testé actuellement par notre partenaire. Il s’agit d’analyser son développement et sa sensibilité dans le milieu afin d’optimiser l’action des filtres sur les eaux industrielles, l’entretien…
La récupération des eaux pluviales se fera dans la foulée. Bientôt, la Sara sera productrice autonome de son eau, une ressource précieuse sur notre île.
Quels sont les autres grands projets portés par Energies Nouvelles ?
– Le projet Energies Nouvelles initié par la Sara met en avant la volonté de l’entreprise de s’impliquer sur les trois territoires avec des perspectives de développement différentes. Ainsi, en Guyane, à Mana, c’est un projet de centrale solaire qui devrait voir le jour très prochainement. La centrale fonctionnera au moyen de panneaux photovoltaïques et de pile à hydrogène. Celle-ci prendra le relais du dispositif photovoltaïque lorsqu’il ne sera pas productif. La centrale sera à même de fournir de l’électricité nuit et jour à toute la région de l’ouest guyanais. Un projet à forte génération d’emplois.
En Guadeloupe, où il est question de mix énergétique, un des projets se fonde aussi sur la pile à hydrogène. L’objectif est de disposer de champs photovoltaïques producteurs d’électricité afin d’électrolyser de l’eau et en extraire l’hydrogène qui sera stocké et alimentera des piles pour produire de l’électricité.