Sur un chantier, la sécurité est souvent perçue comme une contrainte, jusqu’à ce que l’accident arrive. Le BTP est le secteur d’activité le plus impacté par les accidents graves (avec un tiers des accidents invalidants dus à des chutes de hauteur*). Raison pour laquelle la législation française encadre plus strictement le BTP que les autres secteurs.

Le Code du travail oblige effectivement l’employeur à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l’établissement, y compris des travailleurs temporaires. Pour cela, l’employeur est tenu d’évaluer les risques et de prendre toutes les mesures nécessaires. En application des articles L. 4121-1 à 3 et R. 4121-1 et 2 du Code du travail, il doit élaborer et tenir à jour le document unique d’évaluation des risques. Une fois les risques analysés, il s’agit de se mettre en conformité avec la protection et l’équipement adapté à chaque salarié. Il faut aussi veiller à remplacer régulièrement le matériel (attention à l’obsolescence), à mettre en place des instructions claires et efficaces afin de garantir les procédures de travail sécurisées.

Protéger au mieux

Plusieurs types de risques varient selon les chantiers (mécaniques, physiques, biologiques, radiologiques, chimiques, psychosociaux). Il existe donc des équipements de protection individuelle appropriés classés en trois catégories (mineurs : classe 1), intermédiaires/majeurs (classe 2), mortels (classe 3 comme les systèmes d’arrêt de chutes). La plupart des équipements ont une durée d’utilisation déterminée ou sont dotés de dates de péremption. Afin d’assurer le maintien en conformité de certains EPI, un contrôle est réalisé dans le cadre des vérifications générales périodiques (VGP) opérées par des personnes qualifiées ou des bureaux de contrôle. Les résultats figurent dans le journal de bord de l’entreprise avec une retranscription complète et détaillée du suivi.

Encadré :

Influence de la chaleur ou du lavage sur certains équipements

Chaussures de sécurité
A cause du climat, les chaussures de sécurité requièrent un stockage en zone sèche (quand elles ne sont pas portées) afin de conserver leur élasticité et la bonne adhérence de la colle d’assemblage. S’il n’existe pas de date et de nombre d’utilisations limite d’une chaussure de sécurité, elles doivent néanmoins être remplacées en cas de détérioration ou au bout d’un an (en usage non intensif). Les entreprises peuvent définir cette fréquence dans la convention collective du secteur ou dans un règlement intérieur. Attention, si la coque reçoit un objet lourd, elle risque d’être fissurée et ne répond plus aux normes.

Vêtements
Pour des raisons de sécurité, les vêtements de protection sont encadrés par des limites d’usage pouvant être définies en nombre de lavages. Une information qui figure souvent sur l’étiquette du vêtement. Des lavages répétés peuvent user prématurément le tissu et diminuer l’efficacité du traitement apporté au textile. Exemples, les lavages répétés diminuent l’efficacité des traitements d’ignifugation et réduisent les capacités réfléchissantes des tenues à haute visibilité, leur faisant perdre la conformité à la certification.

Autre problématique inhérente au climat tropical : l’équipement de désamiantage, notamment, (bottes, sur-bottes, combinaisons, masques, gants, sacs de récupération…) qui risque de voir son une efficacité altérée par l’humidité. Difficilement stockable, le pack complet est donc commandé et livré à la demande, au même titre que les gants isolants et fragiles des électriciens.

Casques de sécurité
Destiné à protéger contre les chocs et les chutes d’objets, le casque de sécurité existe en version légère, mieux supportée sous le climat tropical. Ce qui n’empêche que, pour être efficace, il doit d’être ajusté au crâne de l’utilisateur afin d’absorber et d’amortir à 100 % les forces. Sa date limite d’utilisation doit être respectée. Cette information (obligatoirement précisée par le fabricant) est notée sur le produit ou sur la notice, aux côtés d’autres renseignements : matériau, fabricant, certification/marquage de conformité CE, poids, plage de tailles, année et trimestre de fabrication, etc. Les multiples agressions (chocs, exposition prolongée aux UV du soleil, mauvais entretien et stockage inadéquat) peuvent diminuer leurs fonctions.

A vérifier également, l’obsolescence du casque de sécurité liée aux matériaux qui le composent (polyéthylène, polyamide ou polyester renforcé) et qui ne présentent pas la même résistance au vieillissement, aux UV, aux déformations thermiques ou aux produits chimiques. Certains casques sont dotés de stabilisateurs d’UV ce qui augmente la durée de vie.

Quelles sont les tendances dans les vêtements de travail ?

Il est courant d’entendre que travailler aux Antilles suppose, évidemment, une adaptation des équipements au climat. Ainsi, sont privilégiées des lignes de vêtements, de casques, de chaussures dans des versions allégées, ventilées. Des équipements qui combinent confort, durabilité, protection (dans le respect des normes). Et récemment, il semble que le critère esthétique intervienne dans le choix final, surtout auprès des artisans et des petites structures.

D’autre part, de nouveaux textiles, dits techniques (généralement inspirés de disciplines sportives), ont aussi fait leur entrée dans les lignes de vêtements de protection. Par exemple, des gammes complètes de vêtements (pantalons, blousons, maillots…) réalisés en tissu anti-UV, à même de stopper 50% des rayons ultra-violets et qui conservent cette propriété après de nombreux lavages. Une réelle réponse au problème de prévention du cancer de la peau, sujet particulièrement sensible sous nos climats.

Parmi les textiles techniques performants, citons ceux qui agissent sur la thermorégulation, évacuent l’humidité, protègent de la chaleur, des flammes et des rayonnements nuisibles, résistent aux risques NRBC (Nucléaire, Radiologique, Biologique, Chimique), aux hautes tensions électriques, aux projectiles (comme les gilets pare-balles), à l’abrasion, à la coupure par tranchage, à la déchirure ou à la perforation…

Enfin, une autre catégorie de textiles dits intelligents ou connectés qui incorporent des composants informatiques et électroniques. Gilets avec Leds intégrés (intéressants sur les zones aéroportuaires), gilets connectés capables d’émettre une alerte lorsqu’un périmètre de sécurité a été franchi. Une mise en réseau de plusieurs gilets permet d’alarmer les autres travailleurs ou une centrale et, à terme, ce genre de dispositif sera même capable des stopper une machine en cas de danger.

(encadré)

Des subventions existent

Les équipements de protection individuelle font l’objet d’aides financières ou de subventions. Il conseillé de se rapprocher des CARSAT (Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail)… Les Aides Financières Simplifiées (AFS) peuvent concerner des investissements d’équipements, de formations ou des études. Elles s’appliquent aux entreprises de moins de 50 salariés et doivent leur permettre d’investir dans des équipements de travail sûrs, de lutter contre une pathologie professionnelle (prévention des Troubles musculo-squelettiques, des dangers liés à l’exposition aux produits CMR : cancérigènes-

mutagènes-reprotoxiques…), de servir à des formations, des études… Il existe des programmes nationaux et des régionaux propres à chaque caisse (Carsat, Cramif, CGSS, RSI).

Des initiatives prises par les grosses entreprises.

Afin d’atteindre le niveau zéro accident, de grosses entreprises n’hésitent pas multiplier des initiatives, de la formation à la pose de pictogrammes sur chantiers, à la prise de photos sur des irrégularités… Certaines sociétés impliquent toute la chaîne hiérarchique de l’entreprise dans la démarche de sécurité afin d’aider à l’appropriation de la notion dans le travail quotidien. Il a d’ailleurs été prouvé que si les ouvriers connaissent les bons gestes, ils ne les appliquent pas forcément. Aussi, pour que la notion de sécurité intègre les gènes de l’entreprise, faut-il aller plus loin que l’acquisition de connaissances fournies par des formations. Comment ? En favorisant la mise en place in situ (via un coaching, des activités autour de la sécurité,… ) afin qu’elle devienne une habitude, voire un réflexe.
* En 2016, en Martinique, on enregistre encore 233 chutes de plain-pied et 160 chutes de hauteur