Les outre-mer sont souvent considérés comme le laboratoire des énergies renouvelables et sont pionniers en la matière. La loi de transition énergétique de 2015 a fixé aux autorités ultramarines un objectif ambitieux : 50 % d’énergies renouvelables en 2020 et l’autonomie complète en 2030.
Le décret n°2017-570 validant la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) de Guadeloupe 2016-2023 a fixé les orientations de la politique énergétique du territoire pour une transition vers une économie décarbonée. La Guadeloupe a fait le choix de valoriser l’ensemble de ses atouts naturels lui permettant ainsi de recourir à une diversité d’énergie renouvelables (géothermie, éolien, hydro-électricité, solaire, biomasse). La part des énergies renouvelables dans le mix électrique du territoire augmente régulièrement et atteint 20% en 2018.
La géothermie
C’est l’énergie la moins chère et la plus stable, qui -si elle est bien gérée- est pratiquement inépuisable ! Elle peut produire de l’électricité 7 jours sur 7, 365 jours par an. En Guadeloupe, la société américano-israélienne ORMAT a racheté l’usine de géothermie de Bouillante en 2016. Actuellement l’usine produit 6% de l’électricité de Guadeloupe mais avec les gros investissements en cours et l’expertise d’Ormat, leader sur le marché depuis plus de 50 ans, la part de la géothermie va augmenter progressivement pour fournir à terme environ 15% du mix énergétique.
Le solaire
C’est l’énergie de l’avenir ! Le souci : c’est une énergie intermittente puisque liée à l’ensoleillement, il faut donc stocker l’énergie avec des batteries, ce qui a un coût. Cependant cela revient beaucoup moins cher qu’auparavant grâce notamment à la baisse des coûts des matériels, ce qui la place à peu près au même niveau que le nucléaire sur les grandes fermes solaires. C’est aussi l’énergie renouvelable qui se développe le plus rapidement. En Guadeloupe, les fermes photovoltaïques sont visibles un peu partout à Petit Canal, à Basse Terre, à Marie Galante et aux Saintes et produisent environ 5% du mix global. C’est une technologie simple mais elle est aussi grande consommatrice de foncier, ce qui incite à limite son développement au sol sur de petits territoires comme nos îles. Leur taille est donc limitée à 4 hectares.
En revanche l’axe de développement sur les toitures est plus intéressant. Si aujourd’hui le photovoltaïque concerne surtout les entreprises ou les administrations comme la Région, l’avenir est à l’auto consommation pour les personnes privées également. Plafonnant aujourd’hui à 5%, le solaire devrait atteindre 15% du mix à l’horizon 2030.
L’éolien
Les premières éoliennes sont apparues en 1993 à la Désirade. Aujourd’hui on compte 12 fermes (Grande-Terre, La Désirade, Marie-Galante et Les Saintes) pour une production de 60MWh soit 3% de l’électricité totale. Avec des conditions climatiques favorables, cette part pourrait être beaucoup plus importante mais le développement se heurte à deux contraintes : les réticences de la population -les éoliennes sont souvent considérées comme une nuisance esthétique voire sonore dans le paysage- et l’interdiction d’installation à proximité du radar météo du Moule. Toutefois, une nouvelle ferme va être mise en service à Sainte Rose et des projets sont à l’étude pour le nord de Grande Terre et Marie Galante. De grosses PME nationales privées comme Quadran et Akuo sont partie prenante. Moins spectaculaire mais allant dans le renforcement de l’éolien : les anciennes éoliennes de petite taille sont régulièrement remplacées par de plus grosses et plus puissantes (on appelle cela le « repowering ») comme cela a été récemment le cas à la Désirade. En 2019, le parc désiradien de la Montagne produira plus de deux fois la consommation électrique de l’île en multipliant par 3 la production d’énergie, tout en divisant par 4 le nombre d’éoliennes.
La biomasse
La biomasse correspond à l’ensemble de la matière organique d’origine végétale ou animale. Elle est utilisée à des fins énergétiques pour la production d’électricité, de chaleur et de froid. L’un de ses atouts est d’être renouvelable : il n’y a pas de risque de pénurie à plus ou moins long terme, comme c’est le cas pour les énergies fossiles. Cette ressource est aussi un facteur de développement économique en plus de l’autonomie énergétique du territoire.
Le développement de la biomasse-énergie constitue un des axes prioritaires de la politique énergétique régionale de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE). Elle prévoit l’utilisation de la biomasse en priorité en substitution du charbon et a permis d’identifier sur le territoire guadeloupéen un potentiel de développement d’environ 65 MW supplémentaires d’ici 2023. Actuellement, seule la bagasse, résidu de canne à sucre est valorisée comme source d’énergie. L’usine thermique du Moule en particulier doit fonctionner à la bagasse en remplacement du charbon avec un objectif de production de 43 MW d’ici 2023. La part des énergies renouvelables dans la production d’électricité passera ainsi de 20,5 % à 35 %.
A terme toutes les usines à charbon vont passer au « tout biomasse ». C’est pourquoi il est impératif de développer toutes les sources existantes sur le territoire : déchets verts, paille, sciures, déchets de coupe et même une partie des ordures ménagères récupérables grâce à la technologie du tri optique.
L’hydraulique
Cette énergie stable est peu développée en Guadeloupe (10MWh) -contrairement à la Réunion où sa part est de 30%- en partie parce que la majorité des rivières exploitables, principales ressources hydrauliques, sont situées dans les zones protégées du Parc National. L’exploitation de ces ressources est actuellement à son maximum et représente 2% du mix énergétique.
Mais la transition énergétique ne pourra pas se faire sans une profonde modification des comportements. Du côté des particuliers, les incitations à faire des économies d’énergie via de grandes campagnes de communication comme en 2018 tendent à porter leurs fruits : la consommation a tendance à baisser ou du moins à stagner. Le choix de matériels plus écologiques (normes A+++ en électro-ménager, lampes LED, chauffe-eau solaire, etc.) rentre dans les mœurs même si ce n’est pas suffisant. Dans le domaine du BTP, les pratiques de construction évoluent vers le « bâtiment exemplaire » dans le neuf et la rénovation : nouveaux matériaux isolants aussi bien pour les toits que pour les murs, démocratisation des panneaux photovoltaïques…
Le gros point noir reste les transports, les plus gros consommateurs d’énergie ! Outre le développement du covoiturage et des transports en commun, l’indispensable travail sur le long terme concernera la généralisation du véhicule électrique. Aujourd’hui encore chères, il se vend quand même une cinquantaine de voitures par an, mais elles se développeront significativement à l’horizon 2030. Et le but sera atteint le jour où les Guadeloupéens rechargeront les batteries de leur voiture électrique avec l’énergie qu’ils produiront eux-mêmes… L’autoconsommation, chiche ?
Le futur parc éolien de Sainte Rose : une nouvelle génération d’éoliennes
Le parc comptera 8 éoliennes réparties sur 12.000 m2 pour une puissance cumulée de 16 MW et devrait produire 35 gigawatt-heure, l’équivalent de la consommation de 17.000 personnes. Doté de turbines anticycloniques adaptées aux conditions climatiques extrêmes de la région, les éoliennes de Sainte-Rose pourront résister à des vents cycloniques de 150 km/h et disposeront d’un système de stockage sur batteries (« Energy Management System »), couplé à un « smart grid » (réseau d’électricité intelligents), pour sa gestion. Avec l’installation de cette centrale éolienne d’un budget global de 50 millions d’euros, financé par Valorem (65%), la Caisse des Dépôts (30%) et Guadeloupe-EnR, une société d’économie mixte locale (5%), la Guadeloupe se positionne comme la locomotive de l’énergie renouvelable aux Antilles françaises.