Les procédures et les enjeux

Le Plan de Prévention et de Gestion des Déchets (PPGD), qu’est-ce que c’est ?

La loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République dite « loi NOTRe » donne compétence aux régions pour élaborer un plan unique pour la gestion des déchets. Jusque-là, la gestion des déchets était organisée par trois plans : le plan départemental de prévention et de gestion des déchets non dangereux, le plan départemental de prévention et de gestion des déchets issus de chantiers des bâtiments et des travaux publics et le plan régional de prévention et de gestion des déchets dangereux.

La loi instaure un unique Plan de Prévention et de Gestion des Déchets qui a pour objet de coordonner à l’échelle territoriale, les actions entreprises par l’ensemble des parties prenantes concernées par la prévention et la gestion des déchets et concerne tous les déchets :

– dangereux, non dangereux et inertes,

– produits dans la région par les ménages, les activités économiques, les collectivités, les administrations,

– collectés ou traités dans une installation de collecte ou de traitement de déchets, utilisés en substitution de matière première,

– importés et exportés.

Afin de répondre à ce nouveau cadre législatif en vigueur, la CTM reprenant les compétences de l’ex Conseil général et l’ex Conseil régional a lancé la procédure d’élaboration de ce plan unique.

Comment est-il élaboré en Martinique ?

La CTM a choisi de co-construire le Plan avec les acteurs de la gestion des déchets en Martinique dans le cadre d’une démarche de concertation au travers :

– d’une instance réglementaire : la Commission Consultative d’Elaboration et de Suivi du Plan (CCES) constituée des représentants des collectivités en charge des déchets, des organisations professionnelles, des services de l’Etat des associations de protection de l’environnement, des éco-organismes, des associations œuvrant dans la thématique des déchets, des associations de consommateurs.

– de l’information régulière du grand public via la mise en ligne d’éléments d’avancement des travaux du Plan de Prévention et de Gestion des Déchets de Martinique (PPGDM) et d’une adresse mail dédiée : plandechetsmartinique@collectivitedemartinique.mq

– l’organisation d’ateliers de concertation qui ont porté sur le traitement des déchets résiduels, la valorisation matière des déchets non dangereux et non inertes, la prévention des déchets, la gestion des déchets dangereux, la valorisation organique des déchets non dangereux et non inertes et la gestion des déchets du BTP.

– 118 acteurs, professionnels, associations, institutionnels, collectivités publiques y ont participé. Ces ateliers de travail ont permis de partager le diagnostic, d’aborder les questions prégnantes pour le territoire et de discuter des objectifs du Plan.

Quels sont les enjeux pour les entreprises martiniquaises ?

L’atteinte des objectifs nationaux fixés impose d’optimiser l’organisation de la gestion des déchets sur notre territoire. Nos contraintes, fortes et connues, sont d’abord réglementaires sur la base 2 principes :

– La responsabilité du producteur ou du détenteur : le professionnel comme tout producteur ou détenteur de déchets est tenu d’en assurer ou d’en faire assurer la gestion, conformément à la réglementation. Il est responsable jusqu’à leur élimination ou valorisation finale, même lorsque le déchet est transféré à des fins de traitement à un tiers (article L541-2). Les producteurs de déchets doivent choisir des filières conformes à la réglementation et s’assurer de la bonne fin de leur élimination ou valorisation.

– La responsabilité élargie des producteurs (ou REP) : (article L541-10 CE ) qui fait obligation aux producteurs, importateurs et distributeurs de certains produits visés, éléments et matériaux entrant dans leur fabrication de pourvoir ou de contribuer à la gestion des déchets qui en proviennent. Cette responsabilité est assurée selon un schéma individuel ou collectif, avec la mise en place d’éco-organismes que les producteurs, importateurs et distributeurs financent et auxquels ils transfèrent leurs obligations.

Nos contraintes sont également structurelles : les faibles gisements tant potentiels que réellement collectés compliquent la mise en place, voire fragilisent la pérennité des installations de recyclage et valorisation. L’absence de filières locales pour certains déchets impacte tant les flux à traiter que les coûts inhérents au traitement. Dans le contexte martiniquais, l’élaboration du PPGD est une véritable opportunité pour l’ensemble des professionnels de développer une stratégie commune, ambitieuse et structurante pour le territoire, en faisant remonter via les organismes consulaires et fédérations professionnelles qui siègent à la CCES, tous leurs besoins en équipements, propositions d’actions et toutes réflexions en vue d’améliorer la gestion des déchets.

Quelles sont les étapes du PPGD de la Martinique ?

La démarche en cours est encadrée par le code de l’environnement et distingue 5 grandes phases :

1/ l’élaboration du Projet de Plan qui comprend un état des lieux de la gestion des déchets, une prospective à 6 et 12 ans de l’évolution de leur production, la définition d’objectifs en matière de prévention, de recyclage et de valorisation des déchets, l’étude de scénarios et la rédaction du projet de plan à partir du scénario retenu

2/ la consultation administrative sur le projet et Plan pour recueillir l’avis de la CCES, de la Conférence Territoriale de l’Action Publique, des autorités organisatrices en matière de collecte et de traitement des déchets, du préfet de région et des collectivités de Guyane et Guadeloupe

3/ l’avis de la Commission Régionale de l’Autorité Environnementale après arrêt du Projet de Plan par l’Assemblée Plénière de la CTM

4/ l’enquête publique qui permettra à la population de donner son avis sur le projet de Plan

5/ la validation du Plan par l’Assemblée plénière de la CTM

Ces phases seront accompagnées par la réalisation de l’analyse environnementale du PPGDM. Démarche qui permettra de visualiser les impacts actuels et futurs des déchets sur l’environnement de la Martinique.

ZOOM sur les déchets du BTP :

Quels sont les types de déchets produits par le BTP ?

Les déchets du BTP peuvent être classés en Déchets Non Dangereux (DND) : bois, béton, plâtre, ferraille, cartons, plastiques, en Déchets Dangereux (DD) comprenant certaines peintures, les solvants, les huiles de vidange, les terres et sédiments pollués, l’amiante et en Déchets inertes (terres non polluées, graves, fraisât, béton, brique, verre plat, …).

Les déchets de chantiers constituent environ 30% du gisement global de déchets de la Martinique

Comment est organisée la gestion des déchets du BTP ?

L’état des lieux réalisé dans le cadre de l’élaboration du PPGDM a d’ores et déjà permis de pointer les difficultés à connaître les quantités de déchets produites par la profession et les différences entre les quantités identifiées et le gisement total calculé sur la base de ratios ou d’estimations. Ainsi, le gisement est estimé à 270 000 t (56 % dans le bâtiment et 44 % dans les travaux publics), dont 228 000 t de déchets inertes (84%), 37 500 t de DND (14 %) et 4 500 t de DD (2 %) (Chiffres 2016). Seules 88 000t sont observées sur les installations.

La typologie des DND du BTP (métaux, plâtre, bois, plastiques, emballages, vitrage, déchets végétaux) est très variable d’un chantier à l’autre. En l’absence de tri systématique sur les chantiers, les déchets non dangereux non inertes sont majoritairement enfouis en Installation de Stockage des Déchets Non Dangereux (ISDND). Par ailleurs, le manque de filières de valorisation locales pour certains DND (plâtre, bois, canalisations plastiques, laine de roche,..) rend leur gestion complexe et ne permet pas à ce jour d’assurer un suivi et la valorisation de ces déchets. Les DD collectés sont exportés pour valorisation ou élimination. Les matériaux inertes sont autant que possible réemployés sur le même chantier ou sur un chantier à proximité avec ou sans traitement, à la place de matériaux naturels d’extraction de carrières.

Quand ils ne peuvent l’être, ces déchets inertes sont valorisés par recyclage sur plateforme de Batimat Recyclage au Lamentin pour ensuite être utilisés en sous-couches routières (44%), réincorporés pour les fraisats d’enrobés dans les deux centrales (11%), utilisés en couverture d’ISDND en cours de réaménagement final (6%). Les 39% restant sont stockés à l’Installation de Stockage de Déchets Inertes (ISDI) de Batimat Recyclage au Lamentin.

Quels sont les objectifs réglementaires ?

Stabilisation de la production de déchets du BTP à l’horizon 2020 (Plan national de prévention des déchets 2014-2020)

Objectif d’atteinte de 70% de valorisation des déchets inertes et déchets non dangereux du BTP (directive UE et Loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte(LTECV))

Exemplarité des collectivités : Priorité à l’utilisation des matériaux issus du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage de déchets dans les appels d’offre (LTECV)

Objectif de diminution des quantités stockées (R.541-41-2 code de l’environnement)

Obligation de reprise pour les distributeurs de matériaux de BTP des déchets issus des mêmes types de produits que ceux qu’ils commercialisent (Art L.541-10-9 code environnement et décret du 10/03/2016)

Quels sont les enjeux pour le BTP ?

Les enjeux sont conséquents pour le secteur et comprennent tant l’amélioration de la connaissance des flux de déchets que l’augmentation des performances de recyclage par, notamment : l’obligation de tri de déchets de chantiers, la priorisation de l’utilisation des matériaux recyclés localement, le maillage du territoire en déchetteries ouvertes aux professionnels, la mise en place des filières de valorisation avec les distributeurs.

L’avancement du PPGDM ?

A ce jour, l’état des lieux, l’étude prospective aux échéances, la définition des objectifs et l’étude des scénarios ont été réalisés et présentés en CCES respectivement les 06/07/2018 et 20/11/2018. Lors de la deuxième réunion de la Commission Consultative d’Élaboration et de Suivi (CCES) du Plan unique de Prévention et de Gestion des Déchets porté par la Collectivité Territoriale de Martinique tenue le 20 novembre dernier, le scénario du futur plan déchets a été sélectionné parmi les deux étudiés. Il s’agissait de définir les capacités du territoire et les moyens à mobiliser pour permettre à la Martinique de respecter les orientations et les objectifs réglementaires en matière de prévention et de gestion des déchets. A été sélectionné un scénario ambitieux permettant de donner des perspectives capables de dépasser le niveau de performance réglementaire et de tendre vers l’exigence européenne en termes de développement d’une économie circulaire et de réduction de production de déchets.

Le projet de Plan est en cours de rédaction à partir du scénario retenu. Il précisera les actions à mettre en œuvre par chaque acteur pour l’atteinte de ces objectifs. Il fera l’objet d’un prochain article. Le Plan de Prévention et de Gestion des Déchets de la Martinique devrait être adopté définitivement fin 2019.