Alors que les ressources en eau sont importantes et suffisantes (7000 m3 par an et par Guadeloupéen contre 3000 m3 en métropole !), plus de 60 millions de m3 d’eau potable sont produits sans pour autant assurer une distribution permanente à tous les usagers.

L’état des lieux  est sans appel : le réseau est dans un état catastrophique. Sur un territoire où les conditions climatiques sont extrêmes, les infrastructures vieillissent plus vite que dans des zones tempérées. Or le réseau guadeloupéen vieux de plus de 50 ans n’a jamais été entretenu par le passé. De l’Etat aux communes et aux gestionnaires de l’eau, les responsabilités sont partagées et indéniables. Résultat, la casse est généralisée et les structures fuient de partout. On estime aujourd’hui à plus de 50% les fuites sur le réseau, avec certaines zones où la perte atteint 70% ! Résultat : des coupures d’eau régulières, des endroits privés d’eau au quotidien, des tours d’eau pour essayer de répartir la consommation et des situations souvent critiques. La répartition est de plus inégale selon la position par rapport aux conduites d’eau, l’eau est globalement produite en Basse Terre et la consommation la plus forte en Grande Terre…

Les gestionnaires de l’eau n’ont plus les moyens financiers d’assurer leurs missions d’entretien et de comptage car bon nombre d’abonnés ne payent plus leurs factures, exaspérés ou profitant d’une organisation défaillante (certains n’en ont même jamais payé ou reçu !).

Un Plan d’actions prioritaires et des contrats de progrès signés avec les intercommunalités

Face à cette crise majeure, le 24 septembre 2018, l’État, la Région et le Département ont signé une convention d’engagements mutuels pour une sortie durable de la crise de l’eau en Guadeloupe, avec deux objectifs principaux : faire cesser les tours d’eau dans les meilleurs délais et permettre la restauration d’une gestion durable et transparente des services d’eau sur l’archipel.

Avec un plan d’actions prioritaires de 71,4 millions d’euros, l’État, la Région, le Département et les collectivités compétentes unissent leurs efforts pour réaliser les investissements nécessaires à la suppression des tours d’eau. En outre, Etat, Région et département se sont entendus pour conditionner leur aide à la signature des Contrats de progrès avec les collectivités et les opérateurs responsables de la distribution de l’eau. Ces contrats sur 5 ans imposent d’avoir des objectifs quantifiables et contrôlables, les aides étant conditionnées à l’atteinte de ces objectifs. En résumé : les investissements sont financés si, en contrepartie, la collectivité compétente s’engage à rétablir sa capacité d’exploitation. Formation et gestion des personnels, remplacement de compteurs, relevés réguliers, facturation, recouvrement… sont quelques-unes des nombreuses actions à mettre en œuvre pour y parvenir.

Le 1er contrat de progrès a déjà été signé par Marie-Galante, le 2e est en cours pour Cap Excellence, ceux concernant le Nord Basse-Terre et le Grand Sud Caraïbe devraient être signés en avril 2019.

Le contrat signé par Marie-Galante le 3 février 2018 est le fruit d’un travail concerté inédit entre les cofinanceurs leur permettant de coordonner l’accompagnement d’un plan d’actions établi sur une durée de 5 ans. Il repose sur 4 axes :

  • Améliorer le pilotage des services
  • Tendre vers une gestion financière saine
  • Améliorer la performance technique du service d’eau potable
  • Améliorer la performance technique du service d’assainissement.

Le plan d’actions prévoit un financement de 7M€ sur la période 2018-2022. Les premiers travaux concerneront le réservoir de la Treille et les canalisations de Saint-Louis.

Grands travaux

La Région assurera la maîtrise d’ouvrages de travaux structurants. Elle est engagée sur 17 chantiers à hauteur de 36 millions d’euros pour la période 2018-2020. La phase d’études étant achevée -le premier chantier sera lancé en décembre avec la sécurisation du captage de Beaugendre (Bouillante/Vieux-Habitants)- la phase opérationnelle commence en 2019, avec de nettes améliorations de la distribution d’eau potable attendues…

Parmi les grands chantiers qui commencent en 2019 et qui devront être achevés au deuxième trimestre 2020 :

  • Le renouvellement de 7km réseaux d’eau potable à Gourbeyre

7km de réseau, à renouveler en priorité, ont été pré-identifiés entre le réservoir de Grand Camp et le pont du Galion, en incluant Vieux-Chemin, secteur fortement défectueux. L’opération vise à améliorer l’alimentation des quartiers en aval du réservoir de Grand Camp. En limitant les fuites, cette opération permettra aussi de remobiliser de l’eau pour d’autres quartiers.

  • Le renouvellement sur 4,5km du feeder* de Vernou et connexion au feeder de Belle Eau Cadeau

L’usine de Vernou dessert des quartiers de Petit-Bourg, Baie-Mahault et Pointe-à-Pitre, soit environ 24 000 habitants. Cet outil est donc stratégique, mais la canalisation en aval de l’usine est fortement défectueuse. Cette opération, en limitant les fuites sur les secteurs cités, permettra de mobiliser de la ressource pour d’autres territoires en difficulté.

* Les feeders sont des pompes placées dans les conduites d’eau

  • La sécurisation du système de distribution sur la commune de Capesterre-Belle-Eau

Les quartiers de Fonds Cacao et Routhiers sont sujets à des coupures d’eau régulières. Ils sont alimentés par le feeder de Belle-Eau Cadeau, avec un petit réservoir de stockage fortement dégradé, ce qui est pénalisant pour le fonctionnement de cette conduite stratégique qui dessert la Grande-Terre. Les travaux visent à restructurer la distribution en eau potable dans ces secteurs en créant des réservoirs et des surpresseurs.

Et aussi…

  • Le renouvellement de 15 km de canalisations sur Capesterre-Belle-Eau
  • La séparation des étages de distribution de Caraque et de Grands- Fonds Gosier
  • La réhabilitation du réservoir de Leroux
  • Le renouvellement de 5km fonte grise entre Basse-Terre et Saint-Claude
  • La sécurisation des captages de Trou à Diable

De son côté, le conseil départemental s’est engagé depuis 2014 dans un premier plan de secours en eau potable dont les travaux devraient s’achever avant fin 2019. Deux nouveaux chantiers sont prévus au niveau de l’usine de Vernou à Petit-Bourg et à Sainte-Rose avec le renouvellement de canalisations dans certains quartiers. Concernant le Plan Eau, la collectivité est engagée sur 16 opérations à hauteur de 20 millions d’euros dont le renouvellement de 15 km de réseaux d’eau potable dans les Grands Fonds de Gosier, la rénovation et la restructuration de l’usine de traitement d’eau potable de Belle Eau Cadeau à Capesterre-Belle-Eau, et les renouvellements de canalisations à Vieux-Habitants et à Bouillante.

Face à une population désabusée, L’État, la Région et le Département s’engagent également à contribuer au rétablissement de la confiance des usagers en apportant une information rigoureuse, transparente et accessible sur l’état des secteurs de l’eau et de l’assainissement en Guadeloupe, avec le concours des EPCI (Etablissement Public de Coopération Intercommunale). Un site internet géré par l’Office de l’eau devra informer en temps réel chaque citoyen, notamment sur les travaux en cours ou programmés et sur la qualité de l’eau. Autre projet : la publication en janvier des « chiffres clés de l’eau » qui permettront aux usagers de faire des comparaisons entre les territoires.

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